A l'occasion du Nouvel An, voici quelques fragments inspirés par les oeuvres de quelques amis intérieurs, certains d'ici, d'autres de cet ailleurs où continue de vivre leur aura. Je souhaite à tous une belle et féconde année 2015 !
Robert Lobet, peintre, graveur, sculpteur, éditeur, peinture, exposition à Nogent le Roi
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Les portes de l'écorce ont ouvert le silence. Et la maison devient ce lent chemin de souffle, salons en enfilade où naissent les nombres et les promesses par le baiser de ton regard qui de très loin s'appuie au mien. Ma soeur dans l'invisible est ce sourire de la distance, tandis que les fenêtres et les fiançailles de la forêt.
Abigail Stern, artiste plasticienne, Book 1: Korean Pillow: (A Book of Diptychs): (pages 25 & 26, alternate view): Mixed media on Hanji book. (9 x 23 3/4 inches) http://www.abigailstern.com https://www.facebook.com/abigailstern1
Naissance d'une pyramide en un matin de transparence. Le monde est l'enfant bleu de son regard dans les jardins de la fraîcheur. Elle ouvre l'horizon, rosier triangulaire multiplié par les trois purs et les quatre visages, et son sommet devient la grâce pour un oiseau d'envol.
Sophie Mariel, écrivain, photographe, vidéaste, Las Cruzes, Nouveau Mexique
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On devine le vent du soir, venu flairer tempes et chevilles pendant la courte halte, tandis que l'horizon soulève son ciel suave et duveteux parlant d'anges et de cygnes aux Léda nomades, grand rideau théâtral aux bleus flous, fuyants sur le lointain du presque crépuscule. Regain de jour sacralisé par son ailleurs avant la nuit, appel ambré qui se révèle au seul regard, dans cette sorte de silence sauvage fouetté par le passage de quelques rares camions, le sifflement des herbes et cet immense baiser face contre face de l'espace grand ouvert.
Joseph Beuys, Sans titre, dessin de miel https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00595024/document
joseph beuys dessins
L'homme est empreinte émue de miel sous la nuée solaire. Lever de fleur dans le brouillard de ce pollen qu'on nomme une aube.
Jürgen Heckel, photographe et musicien https://www.behance.net/sogar_heckel
Ils vinrent par la blancheur, quatre ambassadeurs montant de la brume sur l'étendue de neige où leurs pas étaient silence, pure apesanteur n'imprimant nulle empreinte, comme seuls les anges dans la limpidité de l'incertain.
Patrice Giorda, peintre, Santo Spirito, Acrylique sur toile, 150X150cm, 2006
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Etonnament, Santo Spirito et les édifices voisins semblent des bâtisses abandonnées sur une île de la lagune vénitienne. Tout semble si désert, ouvert au silence d'un horizon sans mesure terrestre qu'on ne s'étonnerait guère de voir passer une barque de pêcheur, glissant entre les herbes marécageuses du premier plan et la rive d'en face, ténébreuse, engloutie dans sa désolation. Monde flottant, dont émane une étrange sérénité menaçante et hypnotique.
Marc Lagoutte, photographe, https://www.facebook.com/talamone
Née d'un collier sans fil qui se disperse, l'aura de l'avant jour est premier monde, jardin de profondeur par l'eau et le brouillard. Le vide n'est pas absence, désolation de l'implacable, ou manque béant, mais profusion d'indéfini montant silencieusement dans la substance d'une aube, et son désert, pressentiment. La voyageuse est aux lisières de tout regard, les lèvres closes, dans le silence ouvert qui la formule et la retient, comme est toute rose fondamentale ; une invisible que son chemin révèle ainsi qu'une goutte à la surface du temps.
Jean-Claude Terrier, peintre, Série : "L'écart, l'entre" - "Evanescence, l'aube" seconde version 195x130 - 2014
http://www.terrier-peinture.com https://www.facebook.com/JeanClaudeTerrier.Peinture?fref=ts
L'aube est bien cette eau blanche qui se précipite entre des forêts de nuit. Elle a nuée, visage et neige, selon son ange. L'absence est le flambeau de la pâleur qui veille en elle un astre humide.
Abigail Stern, Untitled 21, 2013: Gouache and oil stick on slate. (11 3/4 x 11 3/4 inches)
Théâtre de la neige, au petit jour. Dans la maison du givre, l'attente est un brouillard en forme de veilleuse, gardienne des vitres étoilées par une fourrure d'absence où la vision se pose, fin papillon fragile né avec l'aube qui frôle d'un songe tout l'immobile du pays clos. La féérie peut commencer, par ce fantôme d'une seule fumée qui vient à ces fenêtres et les traverse d'une pensée toujours unique, égale et sans lisière tant l'infini des arbres blancs liés l'emporte au grand miroir de leur envers.
Robert Lobet dans l'atelier de la Margeride
L'oiseau marin du livre est né de mains ocrées, frottées d'azur et de pollen. Il est la plus ancienne jeunesse qui monte à la fontaine où tant de lèvres et de regards ont épousé les roses de leurs chemins tremblants.
Jean-Pierre Dupuy, Photographe, Ville en angles n° 273
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Là où la rue se fait grotte, à flancs de nuit et de mémoire pure sans objet, simple matière de la mémoire et ses nodosités, aspérités, grandes plages de muraille lisse ou craquelée, selon les escaliers et les tournants de cette ville de hauteurs et d'abîmes qui n'est plus telle ville en un lieu nommé, mais désormais seulement capitale de l'ombre et de la déambulation où marcher sans fin demeure la seule issue dans le silence. Mais celui-ci n'est pas si total qu'il ne soit habité de murmures, exhalaisons de voix qui se sont tues et continuent toujours de chuchoter, suggérer, mourir d'amour, implorer, psalmodier, réciter ; parfois c'est un bref éclat de rire qui étincelle une seconde comme une allumette frottée dans le noir, et d'autres un chant de femme qui s'élève à demi du rien comme un foulard de soie d'un gris blanc translucide, ondule horizontalement puis s'efface. Un enfant compte et recompte par salves entrecoupées de vides d'interminable et incompréhensibles opérations, un réveil fantôme fait soudain pleuvoir sa grêle d'heure fatidique tout en s'éloignant puis se résorbe d'un coup, comme s'il n'avait jamais sonné. De longs instants de souffle en suspens, errent dans les détours du labyrinthe,, vent de solitude frottant sa tristesse aux murs dont la tombée verticale est si ancienne, si démesurée, massive et farouchement close qu'on se croirait sous les bastions infranchissables de quelque pensionnat glacial où pleurent la poussière et les rayons de lune en des corridors et des salles désertés, tandis que toujours s'incante au coeur du dédale la naissance infinie d'un rosier.
Clément Montolio, peintre, Sans titre, aquarelle sur papier - 65 x 50 cm, 2011
http://www.clementmontolio.fr https://www.facebook.com/clement.montolio?fref=ts
Les eaux seront très hautes,
Et nous allons dormir.
Plus rien ne peut venir
De la forêt masquée.
Les chemins sont fermés
Jusqu’au-delà des plaines,
Comme sont aussi tous les volets
En cette auberge des lointains
Que tu ne connais pas.
Nous reviendrons peut-être
Aux vitres étonnées
Si le brouillard du sang
Nous rend au petit jour.
Tu seras brève et cristalline
Ainsi qu’un peuplier
Dont la plus haute image,
Pulvérisée,
Rejoint la transparence
Par le flambeau de l’air.
Patrick Rousseau, peintre https://www.facebook.com/patrick.rousseau.75?fref=ts
Un hiver pourpre et sa neige d'oriflammes. Le très grand vent de liesse réveille les braises du gel. Jaspes et marbres du haut froid, beau vif aux gestes passionnés d'amante déchirant brusquement ses lettres et ses habits pour se jeter dans la tempête illuminée de son abolition.
Sophie Mariel, Autoportrait
Dans ma bouche est fantôme tenant aura de nuit. Dans ma bouche est visage ouvrant un papillon. Dans ma bouche est nuage formant colombe et double noir d'un astre nu. Dans ma bouche est silence, rougeur de l'anthracite où le lilas des cendres encercle un lent jardin, fumée de roses offertes au blond chemin troublé d'un jour d'automne.
Jean-Pierre Dupuy, Sans titre
Il arrive au silence de suivre un lent couloir
Conduisant à son double,
Fenêtre d'un brouillard où le visage est lampe
Dissimulée,
Aura d'une amoureuse
Dont le regard d'oubli continue de brûler
Dans le lointain arrière-pays
Où veillent encore la clé, le nombre
Et la lumière
De sa disparition.
Marc Lagoutte, route et paysage au givre
La route sans qu'aucun signe manifeste en porte témoignage venait de pénétrer dans le domaine où, par l'hiver, des floraisons d'avril rencontrent tout à coup un jour d'étain étendu par décembre. Surface et profondeur ne sont alors plus qu'un feuillet d'éblouissement dans l'indécis de l'heure qui porte crépuscule de l'aube jusque à la nuit.
Yann Fravalo-riopelle, Photographe, Forêt, de lui ou d'un autre, je ne sais
https://www.facebook.com/yann.fravaloriopelle?fref=ts
Puis elle entra dans le domaine par l'un de ses chemins qui en cherchaient longtemps le seuil, prélude où par la brume chacun de ses emblèmes apparaissait déjà, masqué d'estompe et de silence. Dès le matin venait déjà le crépuscule tôt reparu l'après midi pour graduellement fondre dans le soir à la façon d'une bruine qui n'est que sa vapeur d'avant la nuit. Ainsi les heures, plombées d'indéfini, ne se levant que pour ouvrir la profondeur sur la retombée lente irrésistible des brouillards faisant de ces futaies et ces halliers son oeuvre au noir, lithographie d'insaisissable où s'avancer sur le chemin était en soi un charme accompagnant l'esprit.
Patrice Giorda, Le couchant n° 2, Acrylique sur toile, 116X89cm, 2003
Un lion de roche vient boire la folie jaune. Le vent du soir renverse l'herbe sur le talus sauvage tandis qu'à contre souffle un grand lilas se précipite.
Jean-Claude Terrier, Acrylique sur toile 150x150
Lueur outrepassant la ferme porte du silence, devenue cette ardoise où l'invisible écrit sa trace puis l'essuyant, lui donne élan contre l'absence...
Marc Lagoutte, Route forestière
Passé le seuil des arbres, la route entrait dans l'inconnu de la beauté par la lumière. Martin fit quelques pas sur le goudron de couleur mauve, comme toujours en ce pays de granit, de sources et de forêts. Ses pas firent craquer de menus graviers. C'était le seul son de tout l'espace en cette heure ouverte jusque au rebord de l'horizon. Il n'y avait personne. Seulement le fin glissement de l'air qui s'épanouissait dans le premier matin. A quelques pas, derrière la vapeur du soleil éclata soudain, comme un fruit mûr, le chant luisant d'un merle noir.
Clément Montolio, Sans titre, aquarelle sur papier - 65 x 50 cm, 2011
Tes seins, dépossédés,
Touchent à cette heure de lampe
Effacée d’avant jour.
Car nous avons été jusqu’à ce froid de vitre nue
Blessée par l’incolore,
Et nos fantômes gisent à nos pieds
Dans un long miel séché,
Tandis que vient le monde en ligne de brouillard.
Ce serait jeu perdu si ne veillaient tes seins
Dans le tremblé de la poussière
Où la chambre épuisée rassemble ton visage.
Jean-Claude Terrier, Acrylique sur toile 130x195
Ouvrir la nuit dans un lointain de neige où le très sombre coeur devient lilas de l'infini.
Ouvrir le chant aux cordes du silence, par embellie de la lumière.
Le long regard vient aux fenêtres, verger de vitres nues où le matin de la question
Devient la forme d'un sourire.
Robert Lobet , Sans titre, 150X100, Technique mixte, 2012
La nuit jardin de neige et d'immobile dans la maison du sang.
Absence de ce refuge où tu parlais avec la lune
Par insomnies et larmes sèches.
Le cercle est enfermé dans un carré désert
Où même l'oubli se heurte aux murs.
La soif est seule avec les noms terribles
Et ce rocher de bleu dans l'obsession des heures.
Patrick Rousseau, Peinture
Voilé de neige,
Comme un silence
Devenu son domaine
Est ce regard de l'immobile
Que l'on ne voit,
Mais qu'on pressent
Par l'ambre et le lointain,
Maison d'absence
Où veille une étrangère
Douée de nuit.
Mika Tajima, Peintre plasticienne mika tajima artist
Il serait nuit si ne veillait la souriante
Allongée sur les eaux,
Vivante indéfinie
Que nul amer n’éteint.
Elle est,
Par ambre de lisière,
Journée de monde
A l’horizon.
Ses yeux légers,
Voilant la profondeur
Dans le raisin de son visage,
Reforment sur l’espace
Le flambeau d’un sourire.
Katie Bell, Artiste Plasticienne, Broke, 11X12 In paper, Acrylic, foam and plaster
http://www.katiebellstudio.com
Pureté de Katie Bell
Maison de neige, coeur de pollen est ton regard à l'invisible du matin. La lampe est blanche comme le silence de la promesse, visage ému de pure absence aux vitres du brouillard. C'est nuit de neige, avec une aube à la mesure des yeux qui la dévoilent, muette et nue par sa lueur, ainsi qu'un fleuve qui est, fumée de son cheval. Il passe et disparaît. Puis la forêt devient ce vide et tout oiseau, toute pierre et tout chemin. Demeure la chambre de distance où le verger du givre aux parois blanches éblouissantes, ô mon Amour, ma seule, vivant de nuit, de lampe et de fenêtre avec ce verre taché d'une aube.
Marc-Henri Arfeux, Léman, Acrylique sur toile
Le voyageur du seuil
Revient à sa maison,
Feu grandissant
Selon le chant de solitude,
Ô bleu !
Ton matin d’intervalle
En cette nuit portée si haut,
Dont le rocher vacille
A l’épaulement du flou.
Déjà, le voyageur est loin,
N’ayant laissé parmi les pierres
Que l’assiettée de quelques signes,
Ce peu de lait, de cendres et de vent pur.
Et l’Ange de l’entre deux contemple
En sa nuée
Ce qui de nous s’élève,
Le cœur naissant,
A la rencontre silencieuse.
Promesse à l’incertain de l’heure,
S’ouvre le vide, uni d’un lieu
Sans paysage.
Cela va grandissant par immobile
Jusque à l’épure,
Sourire d’un lac irrévélé
Avec le souffle clair, l’accord de l’horizon,
Les frêles jardins mouvants de l’œil,
Dans le pressentiment des brumes.
Mais pas encore,
Seulement cet instant nu,
Oiseau de l’évasif
Traçant la profondeur,
Le beau qui vive indéfini
Et l’aliment du froid.
Le froid devient la lampe,
Le fleuve où le regard
Seulement devient.
La lampe est un granit avec un pin désert
Se souvenant,
D’ultime étoile.
Ne reste
Aux mains trouées que le
Silence, l’inharmonique
Et long silence tissé d’approche et de distance
Par le peut-être d’un matin.
Mais rien que l’on saisisse,
Et rien qu’un geste pâle,
Noué
Par sa vapeur.
C’est là tout l’enchantement.
Il porte témoignage
Pour les fiançailles de la couleur.
La fiancée dort.
Elle est,
Inexistante et solitaire.
Il faut encore bercer l’empreinte
Qui rêve à son absence
De non rêveuse dormante et non dormie,
Comme un amour dans sa ferveur
De non amour ;
Se rappeler tous les lotus et les iris
De ses seins durs parmi les vagues,
Tandis qu’elle parle et se passionne
Selon le monde.
Sur le rivage de tout à l’heure,
Apparaîtront ses bagues, et les colliers,
Comme dés masqués à l’aventure,
Galets veinés d’échos au répandu de l’apparence
Par nombres et lettres inconnues
Disséminant leurs clés, le beau visage,
Félin fondamental et nu
De l’invisible
A fleur de liesse.
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